CRC-COVID
Des anomalies de la commande respiratoire centrale (CRC) expliquent-elles le défaut de perception des sensations respiratoires constaté au cours de l’infection à COVID-19 ?
Projet porté par Thomas Similowski (UMR 1158)
Dans le cadre de l’atteinte respiratoire liée au SARS-COV2, les cliniciens ont été frappés par la dissociation entre l'intensité de la polypnée et de la désaturation, l’importance des lésions pulmonaires et la paucité des plaintes respiratoires rapportées par les patients au repos ou à la parole. Parmi les manifestations cliniques neurologiques, il a rapidement été relayé la survenue brusque d’hyposmie / anosmie ou d’agueusie. En se basant sur le potentiel neuro-invasif du virus et la proximité avec les bulbes olfactifs de diverses structures neuronales impliquées dans le contrôle de la respiration et dans la genèse de la dyspnée, nous avons formulé l’hypothèse qu’il existe une atténuation des sensations dyspnéiques chez les patients présentant une anosmie/agueusie et qu’elle est secondaire à une atteinte des générateurs du rythme respiratoire du tronc cérébral, et/ou des structures assurant la modulation affectivo-cognitive qui est responsable d’une réponse émotionnelle immédiate (anxiété, peur, frustration, colère)
Afin de répondre à ces hypothèses, l’étude CRC-COVID visait à caractériser la commande automatique à travers l'évaluation des réponses ventilatoires en situation d'hypercapnie et d'hypoxie et la dyspnée lors de différents stimuli (hypercapnie, hypoxie et charge inspiratoire) chez des patients présentant une forme neurologique de la COVID19. Le critère d’évaluation principal était le score émotionnel du questionnaire Multidimensional Dyspnea Profile (MDP) au décours du test de sensibilité à l’hypoxie. Les critères d’évaluation secondaires étaient pour chaque type d’inconfort respiratoire expérimentalement induit : les cotations affective et sensorielle sur les échelles visuelles analogiques (Visual Analogic Scale, VAS) et les dimensions sensorielles et affectives du MDP et les réponses ventilatoires à l’hypoxie et à l’hypercapnie.
50 volontaires ont été inclus. 2 sujets sains (COVID-) ont été exclus à cause d’une anomalie à la spirométrie. Ainsi, 24 patients présentant une anosmie (COVID+) et 24 sujets ont été appariés en âge (COVID- : 24-60 ans ; COVID+ : 22-57 ans – min-max), genre (11 femmes) et IMC (COVID- : 23,3 [20.4-25,1] / COVID+ : 23,7 [21,6-25,5]).
Les résultats montrent des réponses ventilatoires aux tests hypoxique et hypercapnique comparables entre patients et sujets sains et physiologiques (entre 1 et 4L/min/mmHg en test hypercapnique).
Les cotations de la dyspnée ne sont pas statistiquement significativement différentes lors des tests en hypoxie ou en hypercapnie.
Nos hypothèses d’une atteinte de la commande centrale respiratoire en situation d'hypoxie et d'hypercapnie et la dyspnée lors de différents stimuli (hypoxie, hypercapnie) et/ou des structures responsables de l’intégration centrale de la dyspnée chez des patients présentant une forme neurologique isolée de la COVID19 ne sont pas confirmées. Une possible implication d’une altération des récepteurs périphériques (chémorécepteurs et autres afférences vagales pulmonaires en particuliers les fibres C amyéliniques) pourrait être évoquée et sera à étudier.